lundi 4 janvier 2010
Montréal meurt un peu
(source photo)
J’ai été bouleversé d’apprendre ce matin le décès de la chanteuse Lhasa De Sela. Après plusieurs mois de combat contre un cancer du sein, elle nous a été littéralement volée. Elle n’avait que 37 ans.
Lhasa chantait avec la voix de l’âme, une voix chaude et suave comme le bois poli. Loin de l’industrie des star-académiciennes, qui louvoient des vocalises hystériques aux artifices sirupeux, Lhasa chantait comme on souffle sur des braises. On l’entendait s’écouter pour poser délicatement les notes, la bonne note, un peu comme le faisait Miles Davis sur sa trompette. Elle avait compris que le silence, c’est aussi de la musique.
Née au nord des États-Unis, d’un père mexicain et d’une mère américaine, elle a connu une enfance de nomadisme. Avec ses parents ainsi que ses neuf frères et sœurs, elle a sillonné le continent à bord de l’autobus qui lui servait de maison. Elle s’est posée à Montréal au tournant de la vingtaine. Lentement elle s’est bâti une carrière dans trois langues : espagnol, français et anglais.
Je ne sais pas trop pourquoi, mais Lhasa me faisait penser à Montréal. Ce mélange des cultures. Où plutôt cette acceptation décomplexée de l’imprécision culturelle. Ce droit à tout, même si on vient de nulle part (ou de partout). J’ai l’impression que si elle a adopté Montréal, c’est parce que cette ville lui ressemblait un peu. Je ne cherche pas à « revendiquer » Lhasa. Je dis seulement qu’elle me faisait rêver d’un endroit où tout est permis, car il n’y a plus de dictats culturels. Chose certaine, elle faisait partie de mon décor imaginaire, des choses dont je suis fier, des saveurs qui me ramènent à la maison. J’ai si souvent écouté ses albums en boucle, sur les hypnotiques 750 kilomètres de route 138 qui séparent Baie-Comeau de Montréal. La nuit, enveloppé par les étoiles, la ligne droite et le flou des épinettes noires, Lhasa me ramenait jusqu’au port.
Je vous laisse sur ces belles choses trouvées ici et là sur Youtube. Écoutez, vous aimerez. Merci Lhasa De Sela.
Pa’llegar a tu lado, de son deuxième album, ici en spectacle.
Con toda palabra, de son deuxième album (The Living Road).
Rising, de son troisième album, éponyme.
La marée haute, sur The Living Road.
La confession, aussi sur The Living Road.
De cara a la pared, ainsi que La Celestina, de La llorona, son premier disque (ici en version live).
Who By Fire, lors d’un hommage à Leonard Cohen.
Et ceci, avec Patrick Watson il y a quelques mois.
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3 commentaires:
Moi-aussi j'aurais voulu rendre hommage a Lhasa sur mon blog. Mais apres avoir lu ton texte, je me suis dit que je ne pourrais pas mieux exprimer ce que je ressens. Bravo.
J'ai fait un ti billet lundi, tu verras. Je te rejoins 5 sur 5.
Merci
Lôlà de la tortue légère
C'est un beau portrait, très juste. Et l'idée d'imprécision culturelle est à explorer. Mes enfants ont grandi avec les musiques de Lhasa, qui résonnaient si souvent à la maison.
Au petit déjeuner, je ne savais pas comment leur annoncer la mort de la chanteuse. Et j'ai volé un peu vos mots.
Merci
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