dimanche 26 avril 2009

Mourrez pour la cause



(pre-scriptum : désolé si je suis moins assidu. Avec la copine sur place, l’envie de voyager est plus forte que l’envie de râler…)

Je lisais récemment que la ville de Montréal s’apprête à lancer encore une autre campagne afin de sensibiliser les piétons à la prudence. En leur demandera de traverser au carrefour, et uniquement lorsque le feu est vert. Si je pouvais proposer un slogan, ce serait celui-ci : « Mourrez pour la cause ».

À Montréal, je marchais une heure et demie par jour, cinq jours par semaine, pour aller et revenir du travail. La marche urbaine, je connais un peu. Et c’est pas pour rien que je traversais un peu n’importe où.

Les carrefours sont les pires endroits du monde pour traverser une route. Le carrefour force les conducteurs impatients à s’arrêter. Et ils n’aiment pas ça du tout. Ils sont là, à regarder le feu en se répétant : « Vire verte ostie, voyons donc caliss, CI-BOUÈRE que c’est long sacrament! » Je ne sais pas combien de fois j’ai failli me faire rouler sur les pieds par des conducteurs qui démarrent en trombes sans même regarder. Des taxis. Des autobus municipaux. Et aussi des voitures de flics. Certains anticipent et se lancent avant même que le feu ne soit vert.

Une belle habitude montréalaise me plaît bien aussi. Le conducteur voit au loin la lumière qui devient jaune (traduction française : le feu qui passe au orange). Alors il accélère en se disant : « J’ai le temps, j’ai le temps. » Mais il a mal calculé et le feu tourne au rouge. Alors au lieu de freiner, il accélère encore et klaxonne. Que c’est sympathique d’avertir les gens. Quel civisme. « Attention les copains, votre feu est vert, mais attendez encore un moment sinon ça risque de cogner. » Qu’est-ce qu’on dit à un gamin pour lui apprendre à traverser la rue? « Ok mon ti-pit. Quand tu veux traverser la rue, tu attends que la lumière soit verte. Après quand elle verte, tu regardes des deux côtés. Ensuite, t’attends cinq ou six secondes, parce que des fois, ça arrive qu’on monsieur passe en retard même si sa lumière est rouge. » Je me demande pourquoi on tolère ça. J’ai habité un moment à l’angle Papineau-Sherbrooke. À tous les matins, des dizaines de voitures passaient sur la rouge en klaxonnant. Suffirait d’un flic un peu zélé, et on ramasserait assez d’argent en contraventions pour indemniser correctement les piétons blessés par des conducteurs débiles.

Source photo : wikipedia.


Traverser au carrefour, c’est risquer de mourir pour la cause. Donner sa vie pour enseigner aux automobilistes qu’un piéton ça peut crever si on le frappe trop fort. Et c’est salissant : ça te détruit ton pare-brise avec son crâne, en plus de laisser des bouts de jambe dans la grille du radiateur. Après, ça pue le cochon rôti quand la grille chauffe.

Moi, je traversais rarement au carrefour. J’aimais mieux attendre ma « window of opportunity » comme on dit en anglais. À cause des feux, les voitures passent en troupeau. Entre les troupeaux, y’a toujours un moment où la route est libre. C’est le moment. Y’a les voitures qui sont passées, et les voitures qui arrivent au loin. Question de synchronisme. Mais c’est difficile d’enseigner ça à un enfant.

En France, c’est pas mieux. Les Québécois ont peut-être certaines habitudes anglo-saxonnes. Mais pour ce qui est de la conduite automobile, on est plutôt latin à ce que je vois. La voiture qui s’arrête pour te laisser passer, c’est à Boston, à Toronto, à Londres, mais vraiment pas à Paris. Au carrefour, faut vraiment pas insister. T’as les voitures qui te passent sous le nez en toute ignorance des règles élémentaires de la priorité routière. Je me sens presqu’à Montréal. L’illusion serait parfaite, si ce n’était du joli accent : « Casse-toi connard! » au lieu de « Tasse-toé du ch’min tabarnak de cave! »

Je me souviens du lancement médiatique qu’on avait fait pour une campagne précédente. Y’avait le un gros fonctionnaire montréalais tout heureux de répéter la même statistique à toutes les chaînes de télé : « Lorsqu’il y a mort de piéton dans un accident impliquant un véhicule routier, c’est la faute du piéton dans 48% des cas ».

48%

Je me souviens bien du nombre, parce que je me rappelle de ma réaction devant mon téléviseur : « Maudit gnochon! Et dans 52% des cas, c’est à qui la faute? À la foudre? » Les voitures sont dangereuses, est c’est peut-être une bonne idée d’en avertir les piétons. Mais dans la voiture, y’a généralement un humain. On pourrait pas lui parler un peu à lui aussi, de temps en temps?


3 commentaires:

sylviane a dit…

Dans ma douce province, les conducteurs sont "assez" civiques. Mais j'avoue priver quelquefois les piétons de leur droit de passage.Tout dépend de mon humeur, et de la mine (des fois rébarbative)qu'ils affichent!!!Je sais, c'est pas tout bon mais j'assume!!! Je suis une "parfois" mauvaise citoyenne, Oups!!!

Véronique a dit…

Vivement une campagne de sécurité routière en Chine! Ici une seule et unique règle: ne jamais, au grand jamais, laisser passer le piéton. Qu'il soit au carrefour ou en plein milieu de la rue. C'est à croire que les automobilistes gagnent des points en fonçant à toute vitesse sur les piétons. C'est la loi du plus fort et malheureusement pour ceux qui marchent c'est toujours l'auto qui l'emporte. Et je te raconte pas quand c'est un camion!

lili a dit…

Pardon mais je suis morte de rire...C'est tellement vrai.