mercredi 11 février 2009

Casse-toi pauvre con



Je sais pas trop pourquoi, mais la première chose qui m’est venue a l’esprit au réveil ce matin, c’est le fameux épisode « casse-toi pauvre con ». Tout le monde connaît. Si vous venez d’être libéré d’un goulag, je vous fais un rappel. Sarko prend un bain de foule au Salon de l’agriculture. Il serre des mains. Soudain, un vieux con lui dit : « Ah non, touche moi pas, tu me salis ». Et Sarko de lui répondre : « Casse-toi pauvre con ». Scandale! Paroles indignes dans la bouche d’un chef d’État. Voyez les images ici.

Je ne sais pas trop quoi en penser. C’est vrai que ça manquait de finesse. Ça ne colle pas à ce qu’on attend d’un Président. Mais quand même. Humainement, moi je trouve que le vieil insolent ne méritait pas mieux. « Pauvre con », c’est assez juste comme désignation. Premièrement, « tu me salis », c’est pas une manière de s’adresser à un être humain, même s’il est Président de la République. Deuxièmement, « touche-moi pas », c’est pas une manière efficace de trouver un consensus. Car ce vieux con, s’il avait des choses à reprocher au chef, il aurait pu le faire poliment. Selon moi, on a jamais convaincu ni fait réfléchir quelqu’un en l’insultant. Si t’as pas compris ça après 40 ans, c’est vrai que t’es un pauvre con, et probablement pour le reste de tes jours.

Cela dit, l’affaire « casse-toi pauvre con », c’est que de la petite bière pour moi, Canadien. Pas la peine de monter ça en épingle. En 1996, notre bon Premier Ministre Jean Chrétien a fait beaucoup mieux au manifestant professionnel Bill Clennett. Bill est un habitué des tribunes publiques. Activiste connu, et jouissant du temps libre que lui confère son statut de « smicard permanent par choix», Bill est du nombre des dénonciateurs dès que se présente une caméra de télé. Ce matin là, il était au mauvais endroit, au mauvais moment. Ce vieux reportage illustre les événements.

Jean Chrétien, on l’aime ou on l’aime pas. Moi, je l’aime bien. Il m’a toujours fait rigoler. Il n’était pas trop à sa place sur les photos officielles des G7 auxquels il a participé. Il avait toujours l’air un peu habitant. Il s’exprimait mal dans les deux langues officielles du Canada. Mais il était tenace. Et il savait se battre. Difficile de rester dans son chemin. C’est ce qu’on souhaite d’un chef, non? D’ailleurs, Chrétien a gouverné pendant 10 ans.

L’incident est entré dans les annales journalistiques canadiennes sous la dénomination « Shawinigan Handshake ». C’est Jean Chrétien lui-même qui a consacré l’expression lors d’un point de presse, signe de sens de l’humour particulier. Tout est documenté ici, malheureusement en anglais seulement.

Pour mes amis français, je la traduirai par « poignée de main shawiniganaise ». Shawinigan est le lieu de naissance de l’ex Premier Ministre. C’est une ville du nord, sur la rive de la Saint-Maurice. Une vraie ville style « ma cabane au Canada », avec des bûcherons (au temps où il était encore rentable de couper du bois). Le site web de la ville explique en ces mots pittoresques l’origine du nom : « Bien avant l’arrivée des Blancs, les autochtones de la région nommaient ce coin de pays Achawenekane, qui signifie en langue atikamekw « portage sur la crête ». Ce nom faisait référence à la chute qu’ils devaient surmonter par les rochers pour poursuivre leur voyage sur la rivière Saint-Maurice. »

Je vous laisse sur quelques cartes postales.

Les chutes de Shawinigan :



La rivière Saint-Maurice :



Les draveurs sur la rivière Saint-Maurice, au début du dernier siècle. Le mot « draveur » viendrait de l’anglais « driver ». Le métier de ces hommes était de guider les billes de bois sur la rivière, à l’époque où le transport se faisait par simple flottaison :



Et enfin, la célèbre « Shawinigan Handshake » :





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